Par une loi du 4 mars 1790, la France est divisée en départements regroupant plusieurs communes d’après les limites des anciennes paroisses. Pour des raisons administratives, les départements sont divisés en district* et chaque district en cantons eux-mêmes composés de plusieurs communes.

* Dans l’organisation du territoire proposée par Jean Cassini qui visait à homogénéiser le découpage du territoire français, le département était divisé en plusieurs districts (jusqu’à neuf) et chaque district était subdivisé de trois à trente-deux cantons. Les districts disparaissent de la législation en 1795 et sont remplacés par les arrondissements le 17 février 1800.

Claye est choisi comme chef-lieu d’un canton qui comprend, à cette époque,  22 communes** : Claye, Souilly, Annet, Villevaudé, Le Pin, Villeparisis, Courtry, Mitry, Mory, Compans, Messy, St Mesmes, Nantouillet, Le Plessis-aux-Bois, Charny, Villeroy, Fresnes, Charmentray, Précy, Trilbardou, Vignely et Isles-lès-Villenoy.

** Ces communes correspondent aux paroisses de l’ancien doyenné de Claye, séparé du doyenné de Dammartin en 1740.

Un évènement va modifier considérablement la physionomie de beaucoup de ces communes. Sur la proposition des Consuls au corps législatif, le 29 Floréal An X (19 mai 1802), un décret est pris qui ordonne : « l’ouverture d’un canal de dérivation de la rivière Ourcq qui sera amené dans un bassin près de la Villette à Paris. »

Pierre-Simon Girard (1765- 1836)

 

« Le 17 mars 1805 est donné le premier coup de pioche pour la construction du Canal de l’Ourcq, sous les ordres de l’ingénieur en chef, Monsieur Girard***

***Pierre Simon Girard Ingénieur en Chef des Ponts et Chaussées, compagnon de Bonaparte lors de la Campagne d’Egypte.

Le Bassin de la Villette était achevé au mois d’octobre 1808. Les eaux de la Beuvronne y furent introduites le 2 décembre de la même année et coulèrent à la Fontaine des Innocents le 15 avril 1809. »

Plan du tracé du canal (livre de Michel Mérille, le Canal de l’Ourcq)

Le canal à Villeparisis

Notre canton sera complètement modifié par le tracé de ce canal qui traverse : Isles-lès-Villenoy, Vignely, Trilbardou, Charmentray, Précy, Fresnes, Claye, Souilly, Messy, Gressy, Mitry et Villeparisis, soit 12 communes sur les 22 que compte notre canton à cette époque. La longueur du canal qui suit les courbes de niveau est de 107, 914 km entre Port-aux-Perches et le bassin de la Villette. Notre canton est traversé d’Est en Ouest sur 40km, presque la moitié du parcours du canal en Seine-et-Marne. La distance à vol d’oiseau d’Isles-lès-Villenoy à la Rosée n’est pourtant que de 15km, mais combien de détours et de contours dans le tracé de ce canal ? Après la Rosée il est rectiligne jusqu’à Paris. La pente totale à racheter de Silly-la-Poterie au bassin de la Villette est de 15m35. La pente des biefs varie de 6,25cm à 12,36cm par km, mais on utilise en outre 10 écluses dont les chutes varient de 0,60mà 1,80m. Le chemin de halage a une largeur moyenne de 3 mètres dont 2 sont sablés et empierrés. Les deux rives sont bordées de plantation de peupliers.

Rencontre de la Beuvronne et du canal de l’Ourcq à Gressy

L’eau  de la Beuvronne est captée en totalité par le canal de l’Ourcq sur le territoire de Gressy. Afin de ne pas laisser une rivière à sec dans la traversée de Claye, une partie des eaux de la Reneuse est amenée depuis la Rosée jusqu’au lieu-dit « le pont de pierre » où elle rejoint le lit de l’ancienne Beuvronne. Cela nécessite le franchissement du Canal de l’Ourcq en souterrain et le creusement de 500m environ de tranchées ; jusqu’à ce jour les personnes âgées de Souilly appellent cette rivière artificielle ; « Le Fossé Neuf ».

La confiscation de l’eau de la Beuvronne ne se fit pas sans grincement de dents. Les moulins de Claye et d’Annet perdaient une partie de leur force motrice, ils demandèrent et obtinrent des dédommagements.

Ceux-là semblèrent insuffisants puisque le 14 août 1858 : « Le Maire de Claye rend compte du résultat infructueux des démarches faites à la Préfecture de la Seine pour lui restituer les eaux de la Beuvronne et de la Reneuse qui ont été détournées par l’Administration du Canal de l’Ourcq. La Préfecture a répondu que les eaux de la Beuvronne appartenaient à la ville de Paris ainsi que les eaux de la Reneuse et de Mory ».

Bateaux-postes pour Meaux

Il fallut bien se résigner d’autant que le canal permettait le transport de toute une quantité de marchandises qui n’aurait pas pu l’être sans lui. De 1822 à 1950 environ,  il servit le commerce et l’industrie de la région, transportant : sable, gypse, plâtre, bois briques etc… Concurrencé par le rail et la route, son usage économique est devenu nul pour la navigation commerciale. Il semble se donner une vocation touristique mais le fait qu’il ne mène nulle part est un frein à cet essor.

Le canal de l’Ourcq à Claye-Souilly

« Quant à nous gens de Claye, nous avons perdu les eaux de la Beuvronne,  mais nous avons gagné au change avec ce joli canal. Que serait Claye, sans son canal, son pont-levis et sa vieille église qui se mire dans l’eau. Il est beau notre canal et le promeneur ne s’y trompe pas même l’hiver lorsque le givre du matin habille de diamants l’herbe et les branchages qui ornent ses rives. Ce même promeneur qui cherche les violettes de ses talus lorsque mars fait éclore les bourgeons des peupliers et que sortent les petites feuilles pourpres sous le soleil encore timide. Il est beau notre canal l’été sous la canicule lorsque le moindre Zéphir fait frissonner les feuilles de peupliers et qu’elles nous montrent tantôt une face verte, tantôt une face blanche.

Le Canal de l’Ourcq en hiver

Canal au Printemps à Mitry

 

 

 

 

 

 

Claye-Souilly

Claye-Souilly

 

 

Que dire de l’automne, quand sur une eau tiède qui fume dans les petits matins frais, une giboulée de feuilles d’or s’épanche en tournoyant.  Qu’il est beau notre canal lorsque la bise de novembre ride son eau et fouette le visage de ses promeneurs amoureux. Je me revois jeune gamin dépenaillé lançant des pierres plates pour faire des ricochets sur son miroir limpide.

Tu auras bientôt 200 ans mon beau canal, coule tes eaux tranquilles encore longtemps car tu es le reflet de notre cité ».

Texte de Marcel Ruffin (1996)

 

Le Canal de l’Ourcq a été inauguré en 1822.  Son bicentenaire, en 2022, a été fêté par de nombreuses communes.

Monique Mazoyer