(extrait du livre de la Société d’Histoire : «  Les cafés dans l’ancien canton de Claye »).

Comme dans beaucoup de villages de notre ancien canton, les cafés d’Annet-sur-Marne étaient nombreux jusque dans les années soixante. Ensuite, la vie commerciale locale s’éteint inexorablement. Tous les commerces disparaissent peu à peu, y compris cafés et auberges.

La population d’Annet-sur-Marne est pratiquement constante de  900 habitants environ jusqu’après la guerre de 1914. Elle atteint 1200 à la deuxième guerre mondiale, mais cette population relativement nombreuse pour un village n’explique pas une présence anormale de cafés, leur nombre ne paraît pas lié à la démographie. Ils ont commencé à disparaître au fur et à mesure de l’augmentation de la population.

C’est la situation géographique du village et son activité économique qui ont engendré cette prolifération des cafés.

Le premier pont( (1885-1914)

Le village est situé en bordure de Marne.

Depuis le Moyen Âge, jusqu’à la fin du XIXème siècle, le port d’Annet a eu une certaine activité, commerce du bois, du sable, de la pierre à plâtre et du fer.

 

Au XXème siècle, la rivière attire pêcheurs et promeneurs, la gare de Lagny est à 6km. Annet est joignable depuis Paris et sa banlieue en un peu plus d’une heure. Les loisirs se développant, arrivent peu à peu les vacanciers qui séjournent dans les hôtels. Avec les congés payés, c’est aussi le camping qui se développe.

Le village possède des carrières de sable et de gypse. Cette population ouvrière est très importante, il y a jusqu’à cinq cents personnes employées aux carrières de plâtre. Bien sûr, on s’arrête sur le chemin de l’aller et surtout  du retour, que l’on fait à pied jusqu’à son travail, pour partager un petit coup entre amis. Ce ne sont pas seulement des habitants d’Annet qui  y travaillent, il y a aussi une grande population d’ouvriers étrangers à la commune qui y séjournent. Ils se logent majoritairement  dans les hôtels et cafés qui font pension.

Trois exploitations agricoles emploient également un personnel important.

Outre cela, comme partout, le café est le seul lieu de rencontre et de distraction. Ce d’autant plus qu’à Annet, comme dans beaucoup de villages vignerons des alentours, le vignoble a été détruit par le phylloxera et non replanté. Le chemin de fer apporte de meilleurs vins… que l’on consomme en bonne convivialité au café, faute de ne plus le faire dans la cave.

On rencontre, à Annet, trois types de débits de boissons :

– Celui qui est essentiellement un débit de boissons auquel il est toujours adjoint un commerce accessoire, généralement d’épicerie. L’on y loge et nourrit souvent  des pensionnaires.

– Celui qui est une épicerie, voire aussi un bazar, auquel est annexé un café.

– Enfin, le café- hôtel- restaurant.

Quant à la vente du tabac, privilège accordé par l’Etat, elle fluctue entre ces deux derniers types de commerces. C’est parfois la reconnaissance, par l’Etat,  de services rendus. On signale un Annétois qui a participé à la prise de la Bastille et a obtenu ce privilège.

La période la plus faste pour les débits de boissons se situe de la fin du XIXème siècle jusqu’après la Grande Guerre. Pendant la guerre de 1914, Annet, faisant partie du camp retranché de Paris, connaît une présence militaire non négligeable, favorable bien entendu aux débits de boissons.

Dans les années 1920, la très importante crise mondiale, a frappé durement tous les cafés d’Annet et l’on assiste alors à des changements incessants d’exploitants. Ensuite, la fermeture des carrières, en 1936, porte un coup fatal à bien des débits de boissons qui disparaissent.

Lors des années 1940, sous  l’occupation allemande, les nombreuses interdictions (dont celle de réunion) et les restrictions alimentaires mirent les cafés en sommeil. C’est à cette époque que commence une réglementation plus restrictive.

Auberge la Violette 1948

Après 1945, ce fut l’explosion de la joie de vivre. Les vacances au bord de la Marne connaissent un renouveau. Le camping, les bals et le développement du cinéma contribuent à l’activité des cafés.

Hélas, à partir des années 1970, les changements profonds dans le comportement et  la façon de vivre préfigurent la fin de l’économie annétoise. Elle disparaît au cours des années 1980 et la fermeture des derniers établissements s’accélère.

Alors qu’Annet a compté une vingtaine de débits de boissons dans la période faste, il ne reste plus maintenant qu’un restaurant classique et deux autres de restauration rapide ainsi qu’un unique café-bar traditionnel. Des logements  remplacent les autres.

Auberge du Canard qui Fume

Un des plus vieux commerces d’Annet, La maison a été construite après 1776.

Auberge du Pont

Sur la carte ci-contre de 1910 on peut voir le filet du pécheur en train de sécher, accroché à l’angle de l’auberge. A droite la petite maison carrée est celle du passeur avant la construction du pont. Au premier plan les bateaux –lessives (ou lavoirs), qui seront détruits le 3 septembre 1914, avec le pont.

 

Terrasse au bord de la Marne

 

 

La terrasse au bord de l’eau, donne à l’auberge un air de guinguette propice à la détente. On y respire, « le bon air de la campagne » dans la douceur de vivre. La pêche et le canotage sont très prisés et on se baigne dans la Marne non polluée.

 

 

 

Origine et différents noms de l’auberge :

Auberge du Canard qui fume vers 1960

Avant la Révolution, elle se nomme « Auberge St Nicolas », patron des mariniers. Vers 1830, elle devient « l’Auberge du Bac ». Après la construction du premier pont, vers 1885, le nom d’ « Auberge du pont » apparait. Dans les années trente, c’est l’  « Auberge du canard qui fume ».

En 2002, l’auberge est transformée en restaurant marocain et baptisée Le Pacha.

 

L’Hôtel des voyageurs

Place de la fontaine. carte 1906

La charcutière est sur le pas de sa porte en conversation avec son    employée. Trois ouvriers, au milieu de la Grande rue, posent avec naturel. Cette scène se situe entre 1902 et 1912, on distingue sur le bandeau du magasin, DEVINCKE   charcuterie.

Le couple Devincke exploite aussi, dans la boutique attenante, un hôtel-restaurant et café dont on ne peut pas lire l’enseigne. Ils sont locataires de l’ensemble des immeubles.

La première de ces deux constructions est fort ancienne, on en trouve la trace en 1788, la partie restaurant ne date que du XIXème siècle. Ce sont les précédents propriétaires qui avaient réuni les deux constructions séparées pour en faire un ensemble hôtel-restaurant. Il était important puisque comprenant une salle de bal au rez-de-chaussée, avec tréteaux pour orchestre, surmontée au premier étage d’une salle pour noces et banquets et dans la cour un magasin, au-dessus duquel était une salle avec deux billards et leurs accessoires. Il y avait en outre six chambres. Plus tard,  les dispositions furent modifiées tout en conservant billards et salles de danses et de noces.

En 1896, M. et Mme BARBIER avaient ajouté au commerce traditionnel d’hôtel- restaurant- café, celui de charcutier.

Les DEVINCKE cèdent leur fonds de commerce le 9 octobre 1912 à M. et Mme SCRIBE qui  exploitent encore conjointement hôtel et  charcuterie.

Arrêt des cars 1925

 

Il se nomme « Hôtel des Voyageurs » particulièrement bien nommé puisque l’on voit ici l’autobus à son arrêt habituel.

Dans la fin des années 1920, le café change de nombreuses fois de propriétaires.

M.JEHAN ayant cédé une première fois son fonds est obligé de l’exploiter à nouveau pour maintenir sa clientèle. Il l’affiche sur le bandeau de l’entrée principale du café.

 

 

La St Germain 1925

On aperçoit, dans la porte, le patron, tête nue avec ses belles baccantes, à la mode. Sa femme, Mme Jehan abordant la cocarde aux couleurs traditionnelles de la saint-Germain pose au milieu des jeunes gens de la commune qui y participent. La fête annuelle du saint patron de la commune est animée par les jeunes gens, en principe, célibataires de la commune en âge d’être conscrits.

On remarque au centre de la photo un tromboniste et  un clarinettiste qui entourent M. Josse, chef de la musique annétoise avec son cornet à piston.

 

Pub Hôtel des voyageurs avant 1940

Le 5 novembre 1935, M. François BOURREL et son épouse,  accompagnés de leurs deux enfants s’installent dans l’hôtel-restaurant-café qu’ils viennent de reprendre. Ils ont la malchance d’y vivre les quatre années de guerre avec toutes ses difficultés. Même si la présence de militaires allemands n’est pas constante dans le village, l’occupation se fait durement sentir. Les réunions sont interdites, adieu les bals et la Saint-Germain ! Les tickets de rationnement se multiplient et les craintes se développent. La vie est au ralenti et les cafés souffrent aussi.

Octobre 1944, M. et Mme RAULIC viennent de reprendre. C’est la Libération, l’occupant allemand est parti, la jeunesse est à nouveau libre de se réunir. C’est une véritable explosion d’allégresse, les bals que le café organise régulièrement, souvent les samedis soirs et les dimanches, sont très fréquentés.

Un club de foot se monte à Annet. Il élit domicile au café. Le propriétaire en change le nom, son établissement devient tout naturellement l’Auberge des Sports. Fini l’Hôtel des voyageurs !

Auberge des Sports

Après le précoce décès de son mari, Mme Raulic, le 8 décembre 1950, loue, pour neuf ans renouvelables, la salle de cinéma qui se trouve dans la cour, ruelle de Montvêtu, à la Société Triumph. Il est convenu par convention que le cinéma fera un entracte de 15 minutes pour que les clients puissent aller boire un verre. Elle pourra aussi établir  une sonnette indiquant le début de la projection et la fin de l’entracte. Tous les ans, à Noël, le cinéma,  nommé aussi « Le Central », offre une séance gratuite à tous les enfants des écoles.

Affiche du film Casque d’or

 

En août 1951, certaines scènes du film « Casque d’Or » de Jacques Becker sont tournées à Annet. Simone Signoret, la vedette féminine, est logée pendant plusieurs jours à l’Auberge des Sports, pas d’eau courante, le point d’eau et les commodités sont au fond du couloir. On a pu y voir celle qui est devenue une très grande star s’y promener, en tenue de nuit, un broc d’eau à la main. Quel changement, difficile à réaliser actuellement ! Serge Reggiani, autre acteur, est logé à la même enseigne au « Canard qui fume ».

 

 

Changement d’enseigne le  1er juillet 1956. L’auberge devient le Nemrod, du nom de ce personnage biblique grand chasseur devant l’éternel.  Mme Raulic loue le café- hôtel- restaurant à M. et Mme PELLETIER. Ce dernier, passionné de chasse, rebaptise ainsi son établissement.

Et maintenant, plus d’Hôtel des Voyageurs, d’Auberge des Sports, de Nemrod, place « O Copains d’Abord », un nom dynamique et jeune.

L’établissement s’est transformé. Le tabac, loto, PMU et les journaux sont dans l’ancienne grande salle où étaient les billards du temps des Bourrel. La salle de café est devenue un bar- brasserie- plats du jour .

Ce très ancien café d’Annet est toujours debout.

Ces deux établissements font partie de la vingtaine de cafés –hôtels-restaurants d’Annet qui ont été étudiés dans le livre de la Société d’Histoire de Claye sur « Les cafés de l’ancien canton de Claye »-2017-  (livre encore disponible-voir dans Publication)

Hôtel du progrès maison Bablon

Café Au Bon Coin Maison Marleux