« Dans la matinée du 28 août 1944, les chars tigres allemands sont stationnés dans le clos Barizet (actuellement l’Orée des champs) et le chemin du Bray. Leur commandant désigne un nouveau garde-champêtre, Monsieur Leclerc, appelé Reichmarck par la population de Messy. L’officier allemand contraint ce dernier ainsi que le maire à désigner douze otages parmi les hommes présents dans le pays (M.M. Barizet, Fouess, Bignolet Gustave, Jankosky père et fils, Lepaky, Wachet et son beau-père, Béthune, Hélin, Quinet, Latouche). Rassemblés sous le hangar du clos Barizet, ils doivent garantir de leur vie la sécurité de l’occupant.

Vers 19 heures, un avion de reconnaissance de l’armée américaine passe dans le ciel de Messy Dès sa disparition à l’horizon, les chars s’ébranlent, sortent du chemin de Bray, traversent le pays et prennent la route de Saint-Mesmes. Un officier donne l’ordre de libérer les otages, mais un autre leur conseille de se sauver par le Rû du Gué Poiré pour éviter d’être mitraillés par un char ou par des mitrailleuses qui surveillent la traversée du village à l’abri de ballots de paille.

Vers 9 heures du soir, les premiers obus tirés par l’artillerie américaine qui se trouve sur la route de Chauconin à Villeroy, tombent derrière la dimeresse. Toutes les trois à quatre minutes, une salve d’obus tombe sur le pays. A 22h20, un obus tombé sur le clocher bloque les aiguilles de l’horloge. Au bout du chemin des Graviers, une meule de paille prend feu. Un obus éclate sur la poutre maîtresse d’une maison de la Grande Rue habitée par M. et Mme Desmet ainsi que leur fils Pierre. Ils sont tous blessés, mais le plus atteint, au bas-ventre et à l’aine, est M. Raymond Decoudun, dit Toutou également présent.

Le mardi 29 août, vers 2 heures du matin, le bombardement cesse. Des troupes allemandes circulent toujours sur la route de Claye à Saint-Mesmes. A 9 heures, M. Desmet me réveille et me dit que les Américains sont à Messy. Je vais chercher du secours, car dans la nuit du bombardement, personne n’était venu à mon appel pour soigner ou transporter les blessés en dehors de l’abri. Arrivé à la ferme, j’explique à Mme Bouquin que trois de ses employés sont blessés. Elle prévient les Américains qui évacuent M. Decoudun vers un hôpital de campagne où il meurt des suites de ses blessures. Mme Bouquin m’apprend que M. Annotel a été tué dans son abri et M. Jagla a été blessé dans le sien. Elle me demande d’aller à la ferme Barizet où il y aurait des morts. Accompagné de M. Rosiac père et de M. Bobert Maurice, je me rends sur place. Devant la demeure de M. Golebiesky, deux personnes nous appellent (c’étaient des déserteurs allemands de nationalité polonaise). Nous les suivons et découvrons dans la tranchée servant d’abri les corps de Mme Golebiesky, de ses filles Nathalia et Cécile, ainsi que le corps de Mme Trela. Nous rentrons les victimes dans leur demeure et revenons vers la ferme pour rendre compte de ce que nous avons vu.

Dans l’après-midi du 29 août, le petit Novak est écrasé par un G.M.C., de l’armée américaine, à la suite d’une fausse manœuvre sur la route de Saint-Mesmes.

Voilà, il a fallu le passage des chars allemands pour que notre petit village n’accueille pas dans la joie la libération de Messy par les troupes du Général Patton. »

Souvenirs de Monsieur HABERT Fernand.